Analyse du comportement au froid des matériaux cimentaire

Problématique


L'action du gel est une des causes principales de détérioration des ouvrages en béton et des soutènements dans les régions nordiques d'Europe, d'Amérique, d'Asie mais également dans certaines régions françaises (infrastructures routières, remontées mécaniques, cornières ....).
Il est admis que cette détérioration se présente sous deux formes : l'endommagement interne qui se manifeste par la formation de microfissures au sein du matériau et l'écaillage, se manifestant par une dégradation superficielle.
L'écaillage des béton est un phénomène particulièrement nocif. En effet, outre une dégradation esthétique, le décollement d'une partie de la surface du matériau, en favorisant l'intrusion de substances délétères, augmente les risques de corrosion, de carbonatation, d'attaques sulfatiques, etc...
Lors du gel, en raison des interactions entre la surface des pores et l'eau, celle-ci ne gèle pas complètement. Le matériau contient donc de l'eau restée liquide, de la glace, et de l'air dans le cas d'un milieu initialement non saturé. Les détériorations sont alors usuellement attribuées au couplage entre l'augmentation volumique de 9% due à la solidification de l'eau des pores et le transport, au sein du réseau poreux, de l'eau non gelée. Cependant, si les mécanismes physico-chimiques ont déjà été analysés, leurs couplages et leur importance relative dans un matériau poreux consolidé restent encore à être quantifiés. C'est ce que nous proposons de faire.
Pour atteindre cet objectif, trois axes majeurs ont été identifiés. Tout d'abord, la teneur en eau restée liquide au sein du milieu poreux jouant un rôle essentiel dans le comportement au gel, une première étape consiste en l'élaboration d'un dispositif de mesure, par méthode capacitive, permettant de la quantifier. Ensuite, en parallèle des activités de modélisation visant à mieux comprendre le processus d'écaillage, une série de tests d'écaillage va être menée. Cette étude, couplée à une étude bibliographique, nous permettra d'élaborer une banque de données expérimentales conséquente et de vérifier qualitativement le modèle élaboré. Nous espérons ainsi, au terme du travail de thèse, pouvoir mettre en place des indicateurs fiables de durabilité.

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Physico-mécanique des matériaux cimentaires soumis au gel-dégel


Mesure de la teneur en eau dans un matériau poreux partiellement gelé

Publications

T. Fen-Chong, A. Fabbri, A. Azouni, J.F. Thimus (2009) Investigation of Water to Ice Phase Change in Porous Media by Ultrasonic and Dielectric Measurements, Journal of Cold Region Engineering 23 pp 69-90

T. Fen-Chong, A. Fabbri, A. Azouni. (2006) Transient freezing–thawing phenomena in water-filled cohesive porous materials, Cold Regions Science and Technology 46 pp 12-26

A. Fabbri, T. Fen-Chong, O. Coussy. "Dielectric capacity, liquid water content, and pore structure of thawing-freezing materials", Cold Regions Science and Techology (2005) 44

T. Fen-Chong, A. Fabbri. "Freezing and thawing porous media: Experimental study with a dielectric capacitive method", C. R. Mecanique 333 (2005) pp 425-430.

T. Fen-Chong, A. Fabbri, JP. Guilbaud, O. Coussy. "Determination of liquid water content and dielectric constant in porous media by the capacitive method", C.R. Mecanique 332 (2004) pp 639-645.

Résumé des travaux réalisés

Figure 1 : Comparaison entre la distribution de tailles de pore obtenue par l'essai capacitif et celle obtenue par sorption/désorption d'eau (A.G.L.A.E.) pour un CEM I de rapport E/C=0.5

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La mesure de la teneur en eau liquide peut s'effectuer en utilisant le contraste, dans le domaine des hautes fréquences radio (entre 10 et 100 MHz), entre la constante diélectrique réelle de l'eau libre (˜80) et celle des autres constituants du milieu poreux : air et vapeur d'eau (environs 1), solide minéral (entre 2 et 10) et glace Ih (environs 3).
Le dispositif expérimental mis au point est constitué d'un ensemble capacitif (deux électrodes planes renfermant un matériau poreux) mis en parallèle avec un oscillateur (fabrication CECP de Rouen), le tout formant un circuit oscillant mis en résonance. La fréquence de résonance, dépendant de la capacité, est accessible via une carte de comptage. Pour un tel ensemble, la capacité est proportionnelle à la constante diélectrique. Par conséquent, toute variation de teneur en eau liquide peut être quantifiée par celle de la fréquence de résonance.
Dans le cas de matériaux modèles simples comme les billes de verre frittée la relation entre la fréquence mesurée (ou la constante diélectrique globale du matériau) et la proportion d'eau gelée peut se déterminer aisément par le schéma d'homogénéisation de Lichenecker, usuellement utilisé pour ce type de problème.
Cependant, dans le cas plus complexe des matériaux cimentaires, la constante diélectrique de la solution contenue dans les pores dépend de la température, de la concentration en ion et des interactions physico-chimiques avec la matrice cimentaire. Etant donné que ces derniers varient lors d'un cycle de gel/dégel, il devient délicat d'établir une relation directe entre la constante diélectrique globale et la teneur en eau non gelée.
Par conséquent, une information complémentaire sur le comportement de l'eau lors du gel est nécessaire. Nous l'avons déterminée en étudiant expérimentalement le comportement de pâtes de ciment partiellement saturés et non gelés soumises à des cycles de température.
Les courbes de gel (i.e. saturation en eau non gelée en fonction de la température de sollicitation) ainsi obtenues permettent de remonter, via une analyse par thermoporométrie, à la distribution des tailles de pores dans la gamme 2 - 20 nm, et à la surface spécifique. Nous avons comparé les valeurs obtenus via l'essai capacitif à celle provenant d'un test de sorption/désorption (dispositif A.G.L.A.E. du L.M.S.G.C.). Comme le montre la figure 1, nous obtenons des ordres de grandeur comparables. Pour accéder aux photos et posters, cliquez ici.

 

Approche thermomécanique de l'écaillage des milieux poreux consolidés

Publication

A. Fabbri, O. Coussy, T. Fen-chong, P.J.M. Monteiro (2009) Are Deicing Salts Necessary to Promote Scaling in Concrete?, Journal of European Mechanics 134 p 589-598

 

Résumé des travaux réalisés

Figure 2: Résultat d'un test d'écaillage sans sels sur deux pâtes de ciment de perméabilité différente.

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Etant en mesure de caractériser l'état de gel du milieu poreux soumis au froid, il devient possible d'étudier, par une approche macroscopique de type poromécanique des milieux continus, son comportement mécanique. Le scénario de comportement retenu est basé sur le couplage entre l'augmentation volumique de 9% accompagnant la transformation de l'eau en glace, les transferts d'eau non gelée au sein du réseau poreux et le comportement thermomécanique de chaque constituant. L'étude menée se limite au problème linéarisé d'une structure unidimentionelle soumise à l'action du froid en surface. De plus, l'hypothèse des petits déplacements et des petites déformations est adoptée, ce qui borne strictement cette étude à l'apparition de la première fissure.
Les différentes sources de surpression lors d'une sollicitation par le froid, chacune de magnitude comparable, peuvent ainsi être identifiées. A savoir, les pressions hydrauliques dues à la différence de densité entre l'eau et la glace, les dilatations et contractions thermiques différentielles et les transports, supposés instantanés à l'échelle d'un VER, causés par la condition d'équilibre chimique liquide-glace.
Enfin, utilisant ce modèle poromécanique, nous nous sommes intéressé à la compréhension du comportement d'une structure cimentaire soumise à des cycles de gel-dégel en surface en l'absence de sels de déverglaçage ainsi qu’à l'influence des agents entraîneur d'air sur l'endommagement de surface d'une structure en ciment.

 


Analyse expérimentale de l'écaillage

 

Résumé des travaux réalisés

Figure 3: Comparaison entre la résistance à l'écaillage d'une surface huilée (A) et d'une surface non huilée (B)

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Cet essai, basé sur les normes française XP-P18-420 et américaine ASTM C-672, est réalisé en partenariat avec l'Université Marne La Vallée. La résistance à l'écaillage de cubes de béton de 15 cm d'arrête est alors déterminée, tous les 5 cycles de gel/dégel (pour un total de 25 à 40 cycles, 1 cycle en 24 heures), par pesée de la masse d'écaillage sèche formée. Cette étude a pour vocation de mieux comprendre le phénomène d'écaillage et de quantifier l'influence des paramètres difficilement modélisables et inhérents à la mise en place du matériau béton in-situ.
Le premier travail a été de mettre au point, en s'appuyant sur les nombreux tests existants, un banc d'essai d'écaillage à l'IUT de Champs sur Marne (financement UMLV). Par ailleurs, une campagne expérimentale portant sur l'influence des imperfections de mise en oeuvre propres aux conditions en chantiers (sur-huilage du coffrage, la sur-vibration et la mauvaise qualité du coffrage) sur béton ordinaire (Résistance en compression de 20 MPa) a été menée de février à Juillet 2004. Nous avons remarqué, sans surprise, que la qualité de la surface soumise au gel joue un rôle non négligeable dans le comportement d'une structure à l'écaillage (la présence d'huile de décoffrage sur la surface testée double la masse d'écaille récoltée) - Voir figure 3. Pour accéder aux photos et posters, cliquez ici.

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